Station: [24] Le kelsch


F: Rouge, blanc et bleu : ce sont les couleurs des toiles de lin traditionnelles du Ried. Si la palette de couleurs est limitée, leur combinaison en revanche donne lieu à une grande diversité de modèles !

M: C’est à ce tissu appelé « kelsch » que se mesurait la richesse d’un ménage : plus il faisait intervenir de couleurs et plus elles étaient intenses, plus sa ou son propriétaire était fortuné. 

F: Dès leur confirmation, les adolescents recevaient en cadeau leurs premiers ballots de toile. Quelques années plus tard, peu avant le mariage, ceux-ci étaient confiés à un couturier ou une couturière, chargé d’en faire des habits et du linge. Souvent, une voisine ou une connaissance sachant habilement manier l’aiguille se chargeait de cette tâche. Pour tout salaire, elle était nourrie gratuitement pendant la durée de son travail. 

M: Mais elle devait se montrer extrêmement parcimonieuse. Car il y a kelsch et kelsch. Les longues chemises pendues dans l’armoire paysanne, par exemple, étaient généralement faites en plusieurs tissus, de qualités différentes : pour la partie avant et les manches, il fallait prendre un tissu de qualité, pour le dos en revanche, que l’on ne voyait pas, un matériau plus grossier…

F: … et pour les manches bouffantes, le plus exquis des tissus de lin ! Dans la confection des chemises, on évitait le moins possible d’utiliser les ciseaux, pour ne pas fragiliser les lisières, les extrémités du tissu. On fronçait les bordures en petits plis filigranes, pour préserver la trame et avoir la possibilité de reprendre le vêtement ultérieurement au cours de la vie de son propriétaire, de le rétrécir ou de l’élargir. Car le kelsch, fabriqué au prix de grands efforts, était d’une qualité telle qu’il durait facilement plusieurs décennies. 

M: La culture du chanvre a tout de même fini par disparaître du Ried. Face aux importations de sisal et de coton des colonies, son exploitation n’était plus rentable. Autour de 1880 déjà, il avait été rattrapé par le tabac. C’est précisément au tabac qu’est consacrée la dernière salle de notre visite : la grange.

 

 

Photos: © Heimatmuseum Neuried